Dimanche 5 décembre 2021 

24e dimanche après la Pentecôte

La résurrection de la fille de Jaïre 

 

Chers frères et sœurs

Nous célébrons aujourd'hui la fête de saint Saba le sanctifié. Il a été surnommé le civilisateur du désert tant il a oeuvré à l'édification de nombreux monastères. Il est né en Cappadoce au centre de la Turquie actuelle (dans la région des cheminées des fées) en 439. Il a été très tôt attiré par la vie monastique. Il deviendra le disciple d’Euthyme et à la mort de ce dernier il se retirera au désert de Palestine. Guidé par un ange il s'installe dans une grotte sur la rive gauche du Cédron. Il va alors accepter des disciples et faire fleurir le désert de nombreuses Laures (ermites vivant séparément et se regroupant le dimanche) ; il interviendra également contre le monophysisme. Il créera encore de nombreux monastère. Son corps resté intact fut déposé à la grande Laure et sera transféré à Venise au temps des croisades ; il sera restitué à son monastère le 27 octobre 1965. D’autres personnages passeront par la Grande Laure de Saint Saba : Saint Jean Damascène, Cosmas de Maïouma, Etienne, et on lui doit l’élaboration du Typikon tel que nous le pratiquons toujours aujourd’hui.

 

L'Evangile d'aujourd'hui est d'une grande richesse et termine le chapitre 8 de l'Évangile selon saint Luc. Jésus se déplace à travers la Galilée. Un certain nombre de femmes dont Marie de Magdala, Jeanne femme de Souza intendant d'Hérode, Suzanne, le suivent et lui apportent une aide matérielle. Dans ce chapitre, deux paraboles sont données par le Seigneur :

-          Le Semeur

-          et la lampe qu'on ne cache pas.

et quatre miracles face à 4 épreuves

-          une épreuve extérieur : la tempête apaisée

-           une épreuve spirituelle : les démons

-          une épreuve intérieure : la femme hémorroïsse

-          une épreuve de foi : la fille de Jaïre 

 

Donc une femme souffre depuis 12 ans d'hémorragie. Elle est donc impure car le sang qui s'écoule hors du corps est signe de mort (l'âme vitale est portée par le sang) et cette fillette de 12 ans, âge de la maturité à cette époque, est porteuse de l'espoir de vies nouvelles et elle se meurt.

Au sujet du sang, le Christ a volontairement répandu son sang sur la croix, sang de l'Ancienne Alliance qui est le signe de  la mort du Christ et sa mise au tombeau, et c'est aussi celui de la Nouvelle Alliance qui devient le sang vivificateur qu'Il donne en rémission des péchés et pour la vie éternelle.

Lors de la Sainte Cène Jésus prononce la phrase suivante sur le pain :

« Je vous donne mon corps rompu pour vous » et il s'adresse à ses disciples en prenant la coupe et disant : « Ceci est mon sang répandu pour vous (les disciples) et pour la multitude »

Il y a une différence symbolique : le corps c'est celui du Christ et les disciples sont les baptisés ; le Sang est donné aux baptisés et à tous car c'est la vie nouvelle qui est offerte à toute l’humanité pour la vie éternelle, avec une résurrection pour la vie pour ceux qui auront fait le bien, et ceux qui ont fait le mal pour la condamnation. (Saint Jean, V, 28-29)

 

Jaïre est chef de la synagogue de Capharnaüm où Jésus a déjà enseigné et guérit l'homme à la main desséchée. Il est connu de Jaïre qui en père éploré par la maladie de sa fille implore Jésus. Cette femme dans le secret va aussi manifester sa foi en touchant les extrémités du châle de prière dont Jésus était recouvert. Ici nous avons deux prières : une publique l'autre secrète mais une réponse, la compassion du Père qui s'exprime par le Fils. Dans les deux cas il y a le touché : le Christ est touché physiquement par cette femme et Lui va toucher la fillette en la prenant par la main. Combien une main posée sur un malade, une personne âgée, un enfant est un réconfort.

Ces deux femmes caractérisent aussi l'humanité : la fillette symbolise l'humanité déchue restée dans l'enfance ne parvenant pas à la maturité féconde et la femme plus âgée symbolise la perte de la vie c'est-à-dire de l'Esprit qui vivifie. Le sang sera alors répandu lors de l’enfantement dans la souffrance et la perte de sang, puis dans le meurtre d’Abel par Caïn. Mais Jésus ressuscite littéralement à la vie nouvelle ces deux femmes.

Enfin lorsque Jésus est en présence de la fille de Jaïre avec Pierre, Jacques et Jean Il dit cette phrase bien connue TALITHA QUOUM c'est-à-dire petite fille lève-toi. Dans le cri de la résurrection en araméen qui se dit AL MASSIAH QAM on retrouve le même mot, qam et qoum.

Enfin un jeu de mots que seul l'araméen restitue est le suivant : le châle de prière que porte Jésus se dit Talit et petite fille se dit Talitha.

A notre Seigneur soit la gloire dans les siècles des siècles. Amen.

P. Philippe

 

 

Dimanche 21 novembre 2021

Présentation au temple de la Mère de Dieu

Lazare et le mauvais riche

22e dimanche après Pentecôte

 

Frères et sœurs 

Cette année la fête de la Présentation au Temple de la Mère de Dieu coïncide avec le 22e dimanche après la Pentecôte. Au VI  siècle l'empereur Justinien fit élever à Jérusalem, sur l'emplacement de l'Esplanade désormais vide du temple des Hébreux une magnifique basilique dédiée à la Theotokos. Devant cette basilique furent construits deux Hospices, de chaque côté de cet édifice. Un pour les pèlerins et un pour les pauvres. Ceci est rapporté par St Grégoire de Tours et de nombreux miracles avaient lieu en présence des reliques de la Vierge Marie présentent dans cet édifice. Cette basilique fut dédicacée sous le nom de Sainte-Marie le 20 novembre 543. Le lien avec la fête d'aujourd'hui et cette dédicace est assez net. Rappelons que cette fête est empruntée au proto évangile de Saint-Jacques, proto signifiant avant, donc il s'agit des événements qui ont eu lieu avant ce qui est rapporté par les évangiles canoniques. Au VIII siècle un tremblement de terre détruit totalement la basilique et au XII siècle les croisés élèvent à cet emplacement un hôpital qui sera détruit et servira de carrière de pierre aux Musulmans. Au XX siècle a été construite une synagogue toujours à cet emplacement.

Marie est donc conduite au temple pour être consacrée à Dieu et devenir un temple encore plus parfait du Très Haut. Les trois lectures faites aux vêpres donnent le sens de cette consécration..

La première lecture du livre de l'Exode au chapitre 40 parle de Moïse qui exécute les ordres de Dieu pour construire la tente du Témoignage. Une fois réalisée, une nuée couvrira la tente et la gloire du Seigneur remplit le tabernacle. Moïse ne put plus y rentrer.

La seconde lecture fait état de la construction du Temple par Salomon où fut déposée l'Arche d'Alliance dans le sanctuaire. Là aussi la nuée et la gloire du Seigneur remplissent le Temple.

Quant à la troisième lecture du livre d'Ézéchiel il y a fait état de la vision par Ezéchiel du futur temple que construira Zorobabel où il est question de la porte de l'Orient qui restera fermée car le Dieu d'Israël est passé par là.

Marie Enfant entre au temple et devient le temple du Seigneur d’où Il sortira vêtu du corps reçu de sa mère Lui Même temple du Fils de Dieu. Si on contemple l'icône nous voyons la cour du temple qui représente le premier degré de la vie spirituelle qui est de se libérer des passions. L'enfant est accompagné par ses parents. Devant la deuxième partie du temple, le Saint, se tient Zacharie le grand prêtre qui est sur la première marche de l'escalier, lequel compte 15 marches qui conduisent au Saint des Saints. Ces 15 marches sont celles qui permettent donc l'accès au Saint des Saints. Elles sont au nombre de 15 car les prêtres montaient ces marches en chantant les psaumes 120 à 134, connus sous le nom de Cantique des Degrés ou Psaumes graduels. Les pèlerins qui montent au temple chantaient également ces psaumes. Ces 15 psaumes forment le cathisme 18 qui est lu tous les vendredis soir. Dans l'usage slave ils sont lus aussi aux vêpres de l'Exaltation de la Croix jusqu'à l'entrée en Carême de la Nativité et de la fête de la Théophanie jusqu'au dimanche du fils prodigue. On les retrouve dans les matines avant la lecture de l'Évangile dans  Le Cantique des degrés (anavatmi) qui reprennent ces psaumes sous une forme très abrégée.

Nous voyons sur l'icône que Marie se tient en haut de la 15e marche sous une forme d'adulte, revêtue du mophorion. Marie est le modèle de la vie monastique virginale, qui sera louangée et par Saint Athanase en Orient et par Saint Ambroise de Milan en Occident.

Quand est l'évangile du jour, de Lazare (Lazare signifiant Dieu aide) et du mauvais riche, il nous ramène au thème de la richesse. Ce thème est abordé à plusieurs reprises par Jésus, dans la parabole du riche insensé qui se referme sur lui-même avec sa richesse et à qui l’âme sera redemandée instamment. Mais aussi des situations vécues par Jésus, comme avec le jeune homme riche, ou dans un sens positif, Zachée. Ici ce n'est pas la richesse qui est en cause mais l'absence de compassion. Le texte nous dit que les anges emportent Lazare dans le sein d'Abraham. Abraham était un des hommes les plus riches de son temps. Il avait de plus une foi inébranlable et le sens de l'hospitalité lui qui reçu sous son toit les trois anges images de la Divine Trinité. Voilà pourquoi le sein d'Abraham riche de l'hospitalité fait à l'étranger devient jugement pour le mauvais riche.

 Ainsi chantons-nous : « Il a rassasié de bien les affamés Et renvoyer les riches les mains vides ». Ceci se faisant dans le jugement à venir.

 

A Lui soit la gloire dans les siècles des siècles. Amen